des mantras ou des mots ?

Chère lectrice, cher lecteur,

j’espère que vous avez passé une belle semaine, que la vie vous a été douce parfois et que vous avez pris le temps de profiter d’elle. Cette semaine, je voulais vous parler d’une chose qui me turlupine depuis un moment. Depuis que j’ai commencé à faire du yoga, c’était juste après ma grande maladie. Je me suis inscrite à cours de kundalini tout près de chez moi, le lieu était chaleureux, la professeur plutôt sympathique & encourageante. Cours après cours, je sentais un peu de vie & de souplesse revenir, c’était mon petit moment bien-être, tout allait bien.

Mais il y a un truc qui ne passait pas et qui ne passe toujours pas pour moi, je veux parler des mantras. Moi, ça me gêne, ça me gratouille, voire ça m’irrite, de répéter des trucs comme ça dont je ne comprends pas vraiment le sens. Donc je ne fais pas, c’est tout. Mais quand même cela m’interroge. D’où nous vient ce plaisir à répéter des choses dans une langue qui nous est inconnue, qui n’a jamais coulé ni dans notre gorge ni dans nos veines ? D’où vient cet engouement à répéter des formules dont on nous a livré une vague traduction mais qui ne correspondent en rien à nos traditions ni à notre manière de voir le monde ?

Vous savez ce que je vois derrière moi ? Je vois un besoin d’appartenance, un besoin de communion même, mais une peur des mots et donc des choses. Pourquoi ne pas utiliser nos mots ? Pourquoi ne pas créer, si nous en ressentons le besoin, nos formules, avec nos mots à nous, qui sont les mots qu’ont utilisé avant nous toutes les générations qui nous précèdent et qui du coup, résonnent forcément en nous de manière plus profonde que des guru, des gurave & des gamaya… Pourquoi répéter plutôt que dire ?

Je ne sais pas vous, mais moi je trouve qu’il faut une sacré dose de confiance pour répéter des mots qu’on ne comprends pas, dont on ignore aussi la force & le pouvoir peut-être. Alors bon, un professeur de yoga, qui a fait une initiation en Inde, qui s’est penché un peu sur la langue et sur les concepts de la culture indienne, je veux bien, c’est son choix, il répète en connaissance de cause, au moins un peu. Mais pour le commun des mortels, ben moi, je trouve ça trop périlleux, je préfère ne pas répéter tant que je ne sais pas.

Et puis surtout, surtout, moi, je trouve que cet engouement dit notre notre peur de mettre des mots sur les choses. Nos mots. On préfère répèter sans savoir ce qu’on dit. Mais pourquoi ne pas prendre le taureau par les cornes et dire vraiment ce qu’on voudrait dit mais qu’on n’ose pas vraiment, des trucs du genre “je sens le cosmos vibrer en moi” ou “il y a en moi une force de vie divine”… Waouh ! Là, ça fait peur ! Là on va dire que ça va trop loin, on va détourner ses pas. Moi-même je me dis mais tu es folle d’écrire cela. Et pourtant…

J’aimerais savoir ce que vous en pensez ? J’aimerais savoir ce qu’il y a en vous de si gros que vous n’osez pas dire parce que les mots font peur, parce que les mots font exister, parce que les mots disent. Parce que les mots sont tellement plus puissants qu’on ne le croit et que nous avons appris à nous dévier de cette puissance - pour rester petits, peut-être. Et si nous arrêtions d’ânonner des mots venus d’ailleurs, si nous prenions la parole avec nos mots à nous, si nous disions en formules toutes simples nos désirs & notre vie intérieure, ça ferait quoi, à votre avis ?

Je vous souhaite un beau week-end et je vous dis à vendredi prochain !

Précédent
Précédent

les oies sauvages

Suivant
Suivant

nous n’aimons plus assez la vie